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Rien que du positif sur le sida, à partir de la 4e

Le Sida, de Bruno Spire & Graciela Cattaneo

Le Cavalier Bleu, Collection « Idées reçues », 2010, 128 p., 9,8 €

samedi 5 février 2011

Trois ans après la parution de VIH-Sida : la vie en danger, d’Aggée Célestin Lomo Myazhiom, voici un autre excellent documentaire à proposer à nos lycéens (et collégiens, car celui-ci est plus facilement abordable, même si la partie « témoignage » du précédent est un atout important). Je ne reprendrai pas les remarques d’ordre général déjà faites à l’occasion du précédent article, et me contenterai de poser quelques questions (davantage destinées aux adultes qu’aux ados) auxquelles je n’ai pas encore trouvé la réponse dans ces ouvrages. Les deux auteurs sont l’un médecin, l’autre psychologue, et militants de l’association AIDES ; ils se sont entourés de spécialistes pour rédiger l’ensemble de ces articles consacrés aux « idées reçues » sur le sida. De même que l’association AIDES dans sa revue Remaides signale les possibles « conflits d’intérêt » des rédacteurs salariés par l’industrie pharmaceutique, on pourrait chercher la petite bête en considérant qu’une personne qui travaille au sein d’une association fortement subventionnée pourrait être amenée à noircir le tableau, de façon à justifier lesdites subventions, voire son emploi. Il se trouve que ce n’est pas le cas, et cet ouvrage rompt de manière significative avec les slogans mortifères irresponsables (et néfastes au bien-être des séropositifs et à la baisse du nombre de contaminations) encore pratiqués par un grand nombre de médias et d’acteurs de terrain moins scrupuleux. Si je suis amené à reprendre quelques points mineurs, c’est bien sûr avec un grand respect pour l’association AIDES et tout ce qu’elle a apporté à la société (en commençant par le PACS, dont on a oublié qu’il « visait [à l’origine] à préserver des droits pour le conjoint survivant », cf. p. 109).

Le livre se présente en quatre sections et 16 chapitres reprenant des « idées reçues », comme « Le sida a été transmis du singe à l’homme » ou « Un séropositif n’a plus de vie sexuelle », et les confirme ou les infirme, en tenant compte de l’état le plus récent de la recherche, et de réflexions globales qui font tout l’intérêt du livre et justifient le titre de la collection. Ce titre m’avait fait craindre le pire, c’est-à-dire exactement la campagne de pub ringarde et contre-productive que l’InPS a trouvé le moyen de financer en 2010, qui, sous le prétexte de les combattre, martèle les vieilles idées reçues qu’on aurait cru éradiquées par 30 ans de travail préventif : « On n’attrape pas le sida en embrassant / serrant la main / partageant le repas / utilisant les mêmes toilettes qu’une personne séropositive ». Aucune de ces « idées reçues », bien heureusement, n’est évoquée dans ce livre intelligent. On peut vraiment s’interroger sur les motivations des personnes qui mettent sur pied en 2010 de telles campagnes dignes de la fin des années 80. Comme nous l’a appris Pierre Bourdieu en matière de média, il n’y a rien d’innocent, et si les pouvoirs publics financent ce genre de campagne régressives, c’est qu’ils se refusent à diffuser des informations plus utiles, c’est que cela les arrange. Cela fait 20 ans qu’on n’écoute plus ce genre de slogans ridicules : arrêtez de vous moquer de nous !

Les chiffres : à manipuler avec circonspection !

On relève p. 18 puis p. 21 des chiffres de 2008, une estimation de l’Institut de veille sanitaire (InVS) : 6500 nouvelles contaminations par an, 134000 « personnes vivant avec le virus en France, dont 30000 seraient séropositives sans le savoir ». Vous allez dire que je cherche à nouveau la petite bête, mais les chiffres donnés par l’ouvrage précédemment cité faisaient état de 130000 séropositifs pour 2005. Où sont passés les 6500 nouveaux contaminés par an ? (en retranchant 500 décès annuels, bien sûr) ? Je confirme donc – jusqu’à ce qu’on veuille bien me démontrer que j’ai tort – que les chiffres me semblent toujours exagérés… J’avoue que je suis nul en maths, et prof seulement de français ! (Pour la mise à jour de cet article en 2016, je n’ai pas trouvé de nouvelles données).
On appréciera l’honnêteté des chiffres édifiants cités p. 19 : « un homosexuel masculin sur 7 serait donc porteur du virus », ce qui fait une prévalence de 15 %, alors qu’elle est de 0,2 % chez les hétéros (p. 50, d’autres sources évoquent une prévalence « entre 12 et 15 % »). Face à ces chiffres rarement communiqués, on peut se demander si cela justifie d’instrumentaliser cette maladie pour terroriser des générations d’adolescents dans leur découverte de la sexualité [1]. Les États n’instrumentalisent-ils pas le sida pour continuer par d’autres moyens la répression de la sexualité traditionnellement dévolue à la religion ? On peut se demander aussi si cela justifie les législations de pénalisation de la transmission du VIH en vigueur non pas en Iran, mais dans une quinzaine de pays européens (sauf la France pour l’instant). Il est ahurissant de découvrir à quel point nos prétendues démocraties persistent à réprimer la sexualité, tout en donnant des leçons aux pays musulmans sur le respect des libertés. Le diabète et les maladies cardio-vasculaires faisant beaucoup plus de morts que le sida, je suppose que nos politiciens européens vont bientôt emprisonner les parents qui donnent trop de sucre à leurs enfants, non ? Enfin, et c’est un constat plus gênant, si ces chiffres sont véridiques (une différence de 0,2 % à 15 % de la population entre hétéros et homos), est-ce que la discrimination consistant à refuser les dons de sang d’homosexuels masculins ne serait pas justifiée ? (à charge pour les homos séronégatifs en couple stable de mentir sur leur orientation sexuelle s’ils tiennent absolument à donner leur sang !)
Cela dit, revenons sur terre avant de monter sur nos grands sabots, et nous qui sommes nuls en arithmétique, faisons une règle de trois. Supposons que sur cette estimation de 134000 séropositifs en France, il y ait disons au hasard la moitié, donc 67000 hommes homosexuels. Bien. Nous aurions donc 67000 multiplié par 7 égale 469000 homosexuels masculins en France [2]. Là encore, les chiffres me semblent exagérés pour faire peur, car cela donne l’impression que 100 % des homosexuels participent aux gay prides !
D’autres chiffres nous intéressent, car ils permettent de revoir l’idée reçue selon laquelle « Les Africains sont incapables de faire face à l’épidémie de sida » (p. 27) : en quelques années, le prix d’un traitement initial par an a baissé de 10000 dollars à 87 dollars par patient (p. 31), grâce notamment aux médicaments génériques. Sur ce sujet, voir Sida et homosexualité(s) en Afrique. Analyse des communications de prévention, de Charles Gueboguo.

La prévention

Malgré les efforts des auteurs, il reste encore du chemin à parcourir vers une information sans tabou. Par exemple, p. 40, on relève ceci : « les pratiques sexuelles ne présentent pas toutes le même risque de transmission. Par exemple, la sodomie non protégée […] présente le risque le plus élevé […]. Elle implique le contact du sperme […] avec la muqueuse rectale […]. C’est pour cette raison que les homosexuels ont été si touchés par l’épidémie. » Certes, mais on peut d’étonner qu’en 2010, on en soit toujours à ignorer la distinction entre « avec » et « sans éjaculation » [3]. C’est à croire que, dans le domaine de la sexualité, les mêmes tabous demeurent qu’au début de l’épidémie dans le domaine des drogues par injection. Il a fallu plus de 10 ans avant qu’on reconnaisse que ce n’était pas l’injection de drogues, mais le partage de seringues usagées qui contaminait, or leur vente était interdite par la loi, et les associations qui disaient aux toxicos : « si vous vous piquez, ce n’est pas bien, mais faites-le au moins avec des seringues propres » étaient suspectes d’incitation à la consommation de drogues. Difficile de reconnaître que les politiciens qui ont interdit la vente des seringues sans ordonnances jusqu’en 1987 (cf. p. 100), sont responsables de la mort de toxicomanes [4]. Eh bien, il faudrait aussi revoir la prévention, et oser dire aux homos et aux hétéros : « si vous pratiquez la sodomie sans capote, ce n’est pas le top, mais faites-le au moins sans éjaculer à l’intérieur »… On y arrive, mais à tout petits pas.
En tout cas la conclusion du chapitre sur « les homosexuels » (et les bi ?) est remarquable, et tranche avec la politique de l’autruche qui a longtemps été la seule envisageable : « [les pratiques sans préservatifs] ne peuvent être réduites à des comportements irrationnels ou malintentionnés, elles sont le témoin aussi de nouvelles adaptations aux risques » (p. 54). Plus loin, on apprend qu’il est inutile de diaboliser le « bareback », car les nouvelles contaminations sont surtout dues à des personnes en phase de séroconversion (le tout début de l’infection), et qui ignorent leur séropositivité. Ce qui manque peut-être à ce livre, sachant cela (et aux politiques de prévention) c’est une information claire sur les symptômes de la séroconversion, de même que je suis persuadé que même parmi les altersexuels, 90 % ignorent totalement à quoi on reconnaît une syphilis, or la syphilis, si elle se soigne facilement, est très clairement un facteur qui augmente les risques de transmission du VIH… Tout cela qui serait utile on ne nous le dit pas à cause d’obsessionnels de la prophylaxie qui en sont toujours à gaspiller le précieux temps consacré au sida dans les médias à pinailler sur le fait qu’il faudrait mettre un préservatif ou non pour une fellation… Je trouve à ce sujet les auteurs très indulgents vis-à-vis de l’association Act Up Paris : « Il s’agit en fait beaucoup plus d’une stratégie complémentaire qui a porté ses fruits que d’une lutte fratricide » (p. 109). Voyez cet article. L’association liberticide Act-Up, financée par des fonds publics, a eu la peau d’un établissement, le Banque Club. Celui-ci avait voulu organiser une soirée bareback privée, mais les liberticides l’ont empêchée. Plutôt que le bareback soit organisé et conscient, avec possibilité d’information, entre personnes à charge virale indétectable par exemple, Act-Up Paris préfère qu’il se pratique sans information, sans organisation, dans tous les clubs gays, tous les jours. L’histoire en dit pas si le Banque-Club avait oublié de payer sa cotisation annuelle à l’association-danseuse du millionnaire Pierre Bergé… en tout cas, le Banque-Club a fermé ses portes.
Une information m’a étonné : « Les auteurs [d’une étude] estiment que les préservatifs réduisent d’environ 80 % le risque de transmission du VIH lors des rapports hétérosexuels » (p. 44). Je croyais que c’était 100 % ! Les auteurs abordent de nouvelles pistes de prévention globale fort intéressantes : « À l’échelle de la population, des modèles mathématiques démontrent en effet qu’un accès généralisé aux traitements antirétroviraux peut entraîner une réduction très importante du nombre de nouvelles contaminations » Et on est ravi d’apprendre qu’une approche pragmatique se fait (enfin) jour. Le CNS (Conseil National du Sida) est cité : « le traitement peut constituer un instrument précieux pour éviter de nombreuses contaminations chez des personnes qui, de fait, pour de multiples raisons, n’utilisent pas, ou pas toujours, ou pas de façon adéquate, le préservatif » (p. 46). « pas de façon adéquate » : cela doit expliquer les « 80 % » ci-dessus : si on le met sur l’oreille, effectivement…

Pour la prévention positive

Les chapitres sur le sida maladie et la recherche contiennent d’excellentes nouvelles : la « fréquence du sida chez les personnes séropositives n’a cessé de décroître […] et s’établit aujourd’hui [chiffres de 2008] à 1,5 % » (contre 10,5 % en 1994). Et ces chiffres sont encore élevés parce que de nombreuses personnes sont prises en charge tardivement, quand leurs CD4 sont à un niveau très bas. C’est là un excellent argument pour encourager au dépistage, et qui devrait éradiquer tous les messages de prévention irresponsables et contre-productifs basés sur la peur ou qui associent le sida à l’idée de mort. Une personne qui a peur ne se fait pas dépister aussi facilement qu’une personne qui est sûre d’être bien soignée (à un coût réduit, bien sûr, et c’est pourquoi beaucoup d’États africains ont obtenu un grand progrès seulement quand les traitements ont été accessibles à bas coût). Certaines informations modifient notre perception du sida : pour résumer, en 2010, ce n’est plus le sida, mais la séropositivité, qui est une maladie chronique : « on meurt encore du sida en France, et on meurt aussi du VIH sans sida comme nous l’avons vu avec les complications associées » (p. 67). Cela constitue peut-être un élément de réponse à une question posée ci-dessus : quand une personne est séropositive depuis 25 ans ou plus (les survivants, encore nombreux, des premiers tests en 1985), et décède d’une autre cause, ce décès n’est sans doute pas comptabilisé dans les statistiques du sida. En tout cas, grâce aux progrès de la recherche, « les patients en succès de traitement sur les plans virologique et immunologique, ont une espérance de vie proche de la normale » (p. 73). Chouette !

Pour conclure en ce qui me concerne (encore une fois, sur ce sujet sensible, pardon aux auteurs du livre de me servir de leur (excellent) ouvrage pour développer mon propre discours), espérons que ce livre contribue à faire faire à la prévention des MST en milieu scolaire et auprès du grand public un virage à 180 degrés…

 Pour davantage d’informations, on complètera la lecture de ce livre par les numéros de la revue Remaides. Dans le dernier numéro au moment de la rédaction de cet article (n° 74), le Pr suisse Pietro Vernazza évoque la possibilité pour les femmes séropositives de procréer, dans le cadre de la « prévention positive », un nouveau concept d’avenir : « Je préconise de préférence de tenter la voie naturelle en tenant compte de l’efficacité du traitement. C’est-à-dire que vous ayez des relations sexuelles sans préservatif avec votre partenaire, votre charge virale indétectable le protégeant de toute contamination. » Cette « charge virale indétectable » est encore un progrès de la thérapie peu connu du grand public à cause de la tendance à dramatiser… Ou de la tendance française à détester les bonnes nouvelles, allez savoir !

 Un conseil de prof : chers collègues documentalistes, en même temps que vous commanderez l’un de ces deux livres récents (ou les deux), je vous prie de bien vouloir jeter à la poubelle tout documentaire sur le sida datant d’avant 1995, voire 2000… (par contre les romans des années 80 ou 90 conservent leur valeur, à condition d’informer les élèves que les choses ont radicalement évolué depuis). Voici la liste des livres pour la jeunesse dans lesquels le thème du sida est au premier plan :
Maïté Coiffure, de Marie-Aude Murail, Le Cerf-volant brisé, de Paula Fox, La Nuit du concert, de M.E. Kerr, Comme la lune, de Daniel Meynard, Fous pas le camp, Nicolas ! de Claude Raucy, Mon cœur bouleversé, de Christophe Honoré, La Vie à reculons, de Gudule, Mais il part… de Marie-Sophie Vermot, Aimer par cœur (L’Instit), de Gudule, Tellement tu es ma sœur ! de Clotilde Bernos, Lettres à qui vous savez, d’Hervé Debry, Tout contre Léo, de Christophe Honoré, L’Envers du décor, de Gudule, Brenda a un petit dragon dans son sang, de Hijltje Vink & Diny Van de Lustgraaf, Pedro et moi, de Judd Winick, L’Avenir perdu, d’Annie Goetzinger, Jonsson et Knigge., Jo, de Derib.

 Voici enfin quelques questions précises (et politiquement incorrectes pour les staliniens de la prophylaxie). Je tâcherai d’obtenir une réponse d’une source fiable ; si vous-même avez des éléments, merci de m’en faire part.

 Question n°1 : S’il est clair que le VIH est transmis par le sang, le sperme ou les sécrétions vaginales en contact avec une muqueuse, quel est le liquide corporel susceptible de transmettre le virus lors d’une pénétration anale, si la personne séropositive est dans le rôle réceptif et la personne séronégative dans le rôle insertif ? Quel est le risque de contamination en ce cas, comparé au risque dans le cas où la personne séropositive est dans le rôle insertif ?
 Question n°2  : Quelle est la différence de risque estimée entre une pénétration anale ou vaginale avec et sans éjaculation ?
 Question n°3  : Pour quelle raison la circoncision diminue-t-elle le risque de transmission du V.I.H. ? Voir cet article de juillet 2011, qui contient des infos à ce sujet.
 Question n°4  : Pour quelle raison est-ce qu’on ne place pas sous traitement les nouveaux séropositifs dès leur contamination, même s’ils sont au-dessus de 500 CD4, surtout les personnes ayant une activité sexuelle multipartenaire ?
 Question n°5  : Pourquoi est-ce qu’on n’arrête pas le traitement une fois que la personne passe en « charge virale indétectable » ? Y a-t-il une perspective de n’avoir plus de traitement à vie ?
 Question n°6  : Pourquoi les pouvoirs publics persistent-ils à financer des campagnes avec des slogans du type : « On n’attrape pas le sida en embrassant une personne séropositive », plutôt que d’informer par exemple sur le progrès que constitue la charge virale indétectable ?
 Question n°7  : Si on considère qu’un homosexuel sur 7 est séropositif, et que cette statistique inclut tous les homosexuels, y compris ceux qui vivent en couple stable et fidèle et ceux qui n’ont plus de sexualité, à quelle proportion peut-on évaluer le taux d’homosexuels séropositifs parmi ceux qui fréquentent les sites ou lieux de rencontre ?
 Un élément de réponse à cette question est fourni par une polémique sur une enquête de prévalence menée par l’INVS dans les établissements gays en 2009 (voir le site Prévagay). Je ne connais pas les détails du dossier, mais il est sûr que si l’on extrapole les données recueillies dans les backrooms sur toute la communauté gay, on risque d’aboutir à une sévère surestimation !

 Je remercie pour ses réponses (ci-dessous) Florent Jouinot, membre du Comité de l’association vaudoise VoGay. En tant qu’associatif et bien que n’étant pas professionnel de santé, il s’informe et milite sur la question du VIH.

 Pour la question 1bis : la réponse ci-dessous étant confuse, Florent Jouinot apporte la rectification suivante : Pour l’insertif, la circoncision divise par 2 le risque d’infection. Le risque est 15 fois supérieur pour le réceptif par rapport à l’insertif.

 La définition exacte du mot « Dipping » est difficile. Dans l’absolu, le terme recouvre toute pénétration sans préservatif mais sans éjaculation. Pour autant, cela recouvre plusieurs réalités dans la pratique : depuis le frottement de la verge sur l’anus (ou les lèvres/clito dans un rapport hétéro) et/ou une légère pénétration, jusqu’au rapport pénétratif « complet » mais sans éjaculation (coitus interruptus). Le terme intervient dans le cadre de l’analyse des pratiques sexuelles visant à la réduction des risques. Ici cette pratique fait écho au fait que c’est majoritairement via le sperme que l’insertif transmet le VIH au réceptif… pas d’éjaculation interne est perçu comme l’assurance de ne pas transmettre le VIH. La réalité biologique étant un peu différente (le risque n’est pas nul) et la pratique parfois dangereuse (pas toujours facile de se retenir).

 Les pénétrations anales sans préservatif et avec éjaculation sont désignées sous le terme de « barebacking », mais ce terme est souvent utilisé de manière abusive. Tout rapport non protégé n’expose pas à un risque (notamment dans le cadre des couples stables exclusifs sexuellement ayant fait un dépistage croisé après 3 mois), et tous les rapports sexuels à risque (càd sans protection) ne relèvent pas d’une volonté claire comme c’est le cas des réels barebacker (d’aucuns prennent des risques par ignorance du risque, par manque de force morale pour imposer le préservatif, par excès de confiance envers le partenaires et/ou ses dires sur son statut sérologique…). Dans le domaine des pratiques sexuelles contemporaines – et notamment HSH (hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, NDLR) – les anglicismes sont nombreux et repris par les « experts » du domaine mais malheureusement rarement accompagnés d’une définition académique. Ainsi chacun use (et souvent abuse) de termes sans en connaître la définition exacte (les rapports sérieux sur ces questions comportent tjs un lexique afin d’éviter toute confusion). Fin de la note de Florent Jouinot.

P. S. Signez la pétition de AIDES contre l’article 17 ter de la nième loi xénophobe qui, en 2011, vise à déchoir les étrangers de leurs droits aux soins, ce qui constitue une régression dangereuse dans la lutte contre le sida.

 Ce livre fait partie des nombreux ouvrages que j’ai lus pour écrire mon essai Le Contrat universel : au-delà du « mariage gay ». Et si vous l’achetiez ?

Mise à jour de 2016

Suite à un séjour touristique à San Francisco, j’ai pris la photo suivante et fait quelques recherches pour mettre à jour cet article qui date un peu.

Publicité pour la PrEP dans le métro de San Francisco
© Lionel Labosse, 2016

Il s’agit de la photo d’une publicité prise dans le métro de San Francisco, concernant la « PrEP », c’est-à-dire « prophylaxie pré-exposition » consistant en une prise orale de Truvada censé réduire le risque de transmission du VIH pour des personnes ayant des rapports sexuels sans préservatifs. Lire un article informatif sur le site de CATIE la source canadienne de renseignements sur le VIH et l’hépatite C. Sans entrer dans des détails qui n’ont pas lieu d’être dans un tel article, on peut remarquer à la fois le pragmatisme de la communauté gay san franciscaine, mais aussi son hypocrisie. Sur le site d’un célèbre club de rencontres gay « blow buddies » (je ne fais pas de lien mais les curieux trouveront facilement), il est précisé que les « membres » du club (les clients, quoi) s’engagent à pratiquer scrupuleusement le « safer sex ». Or dans la réalité des faits, ce que j’ai constaté (dans le cadre d’une « observation participante » de sociologue en herbe comme définie dans cet article, cela va sans dire), c’est que les pots de préservatifs mis à disposition sont couverts de toiles d’araignées, et que personne ne s’en sert plus. L’hypothèse que j’avance – avec les précautions d’usage – est que cette pratique de prévention est générale à San Francisco, dont la population gay friquée peut se la payer, et que les tarifs élevés de ces clubs gays permettent de s’assurer qu’aucun pauvre ne les fréquente, ce qui fait que les clients estiment qu’ils n’ont quasiment plus de risque, s’ils sont séronégatifs en PrEP, d’être infectés par le VIH, et donc n’utilisent plus le préservatif. On est loin de ce pragmatisme en France, et pourtant, il est clair qu’une utilisation généralisée de la PrEP dans les milieux à risque contribuerait à l’éradication du virus…

 Lire un article d’un blog de Médiapart sur l’origine de l’épidémie de sida, qui balaie l’hypothèse du « patient zéro ».
 Entrevue avec Françoise Barré-Sinoussi en juillet 2017 sur le site du journal Le Temps, qui fait le point sur les perspectives de la recherche.

Lionel Labosse


Voir en ligne : Site de l’association AIDES


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Retrouvez l’ensemble des critiques littéraires jeunesse & des critiques littéraires et cinéma adultes d’altersexualite.com. Voir aussi Déontologie critique.


[1Nous l’avons aussi instrumentalisée, du moins avant l’an 2000, comme un détour pour parler d’homosexualité à l’école, ce qui était impensable à l’époque sans ce biais.

[2On note au passage l’oubli constant dans la communauté prétendument LGBT de la catégorie des bisexuels, comme si en matière de transmission des MST cette catégorie était insignifiante… La formulation de la p. 50 me semble plus correcte : « 37 % des nouveaux diagnostics sont liés à des relations homosexuelles » : en effet, c’est cela qui compte, et non que la personne se considère ou non, comme homo ou bi ou hétéro, ou se prétende telle…

[3Cet aspect est effleuré p. 54, il est question d’« évit[er] le contact avec le sperme lors de pratiques non protégées », mais on sent que la question sent encore le soufre en 2010 !

[4Quand on repense à cette période où il n’était pas possible à un citoyen d’acheter une simple seringue sans que tout le Landernau médical donne son accord, on se demande ce que c’est que la démocratie…

Messages

  • ► Question n°1 : S’il est clair que le VIH est transmis par le sang, le sperme ou les sécrétions vaginales en contact avec une muqueuse, quel est le liquide corporel susceptible de transmettre le virus lors d’une pénétration anale, si la personne séropositive est dans le rôle réceptif et la personne séronégative dans le rôle insertif ?

    Un contact de muqueuse (revers du prépuce essentiellement) à muqueuse (de la paroi anale) suffit pour une transmission virale.

    ► Question 1 bis. : Quel est le risque de contamination en ce cas, comparé au risque dans le cas où la personne séropositive est dans le rôle insertif ?

    De mémoire, le risque est qq chose comme 15x supérieur (différence presque doublée en cas de circoncision).

    ► Question n°2 : Quelle est la différence de risque estimée entre une pénétration anale ou vaginale avec et sans éjaculation ?

    Tjs de mémoire, 5 à 10 fois plus élevé.

    Il y a eu une étude nord-américaine sur la réduction des risques qui proposait des comparatif du risque de transmission dipping/éjaculation.

    ► Question n°3 : Pour quelle raison la circoncision diminue-t-elle le risque de transmission du V.I.H. ?

    La circoncision réduit la taille de la porte d’entrée et double l’épaisseur de celle-ci. ^_^

    La face interne du prépuce est couverte de muqueuse qui est lq principale porte d’entrée du VIH pour l’insertif.
    La suppression de cette surface réduit de facto le risque de transmission.

    Après circoncision le glang est exposé à l’air libre et se couvre de kératine qui réduit la perméabilité de celui-ci.

    ► Question n°4 : Pour quelle raison est-ce qu’on ne place pas sous traitement les nouveaux séropositifs dès leur contamination, même s’ils sont au-dessus de 500 CD4, surtout les personnes ayant une activité sexuelle multipartenaire ?

    Parce que les choses sont un peu plus compliquées que cela... mais dans l’ensemble, c’est ce qui est de plus en plus préconisé (cf. TasP : Tratment as Prevention).

    ► Question n°5 : Pourquoi est-ce qu’on n’arrête pas le traitement une fois que la personne passe en « charge virale indétectable » ? Y a-t-il une perspective de n’avoir plus de traitement à vie ?

    Des études ont été mené sur des interruption de traitement et les résultats ne laisse aucun doute : augmentation de la charge virale, chutte des CD4 et apparation de résistance aux traitements.

    Récemment en Espagne, un essai sur un vaccin thérapeutique semble avoir donné de bon résultat... c’est la seule piste actuelle qui laisse présager l’arrêt possible des traitements.

    ► Question n°6 : Pourquoi les pouvoirs publics persistent-ils à financer des campagnes avec des slogans du type : « On n’attrape pas le sida en embrassant une personne séropositive », plutôt que d’informer par exemple sur le progrès que constitue la charge virale indétectable ?

    Parce qu’ils préfèrent s’attaquer à la stigmatisation/discrimination (actes) et aux préjugés (attitudes) sur les personnes séropositives sont victimes plutôt que de déconstruire les stéréotypes (croyances) qui les sous tendent ?
    Ce n’est pas le seul domaine ou cela est constatable (homophobie, sexisme...).
    Cela s’explique tout simplement par le fait que c’est plus rapide et plus simple de communiquer/informer sur les 1er que de déconstruir les 2nds, cela constitu un travail au long cours dans lequel les pouvoirs publics ne souhaitent pas s’engager.

    ► Question n°7 :

    Je ne sais pas d’ou sort ce chiffre qui affirme qu’1 homo sur 7 serait séropo au VIH...
    Il est par nature impossible d’avoir une certitude sur ce point, d’une part parce qu’il faudrait définir plus exactement la population regroupée sous ce vocable "homo" (ce qui est un problème sociologique en soi) et d’autre part parce que l’on ignore le nombre d’"homo" au sein de la population.
    Les études de prévalence du VIH parmi la "population homo/bi-sexuelle masculine et autres HSH" se fondent sur des suputations difficilement défendables.

    Pour ce qui est de Prévagay : cette étude est très utile (voir totalement nécessaire) pour faire un état des lieux de la prévalence du VIH parmi une population particulièrement exposée : les HSH fréquentant les lieux parisiens de consommation sexuelle.
    Cette étude quantitative doit être suivie d’une étude qualitative afin de déterminer les causes du constat établi. Ensuite devra être mise en place une campagne de prévention adaptée.

    En revanche, Prevagay ne peut en aucun cas être considérée comme une étude de la prévalence du VIH parmi la "population homo/bi et autres HSH française"...
    Il suffit de comparer l’échantillon de l’étude Prévagay d’une part et ceux des études Baromètre Gay (internet et presse) d’autre part pour ce rendre facilement compte qu’il s’agit de population bien différente.
    Dans ces 2ndes études, les personnes fréquentant les lieux de consomation sexuelle ne représentent que qq % alors qu’elles constituent plus de la moitié de l’échantillon de Prévagay.

    Il faut se méfier de ces chiffres que d’aucuns nous lancent au visage régulièrement (notamment des politiques) pour sous tendre des stéréotypes à l’encontre des homos... alors que dans le même temps ces mêmes politiques refusent de mettre en place des actions de préventions spécifiques pour cette population.