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Un héros de la cause gay, pour le collège

Harvey Milk : « Non à l’homophobie », de Safia Amor

Actes Sud Junior, « Ceux qui ont dit non », 2011, 96 p., 7,8 €

mardi 20 décembre 2011

Harvey Milk a été choisi sans doute pour sa mort tragique, comme figure de proue de la lutte pour les droits des homosexuels dans la collection « Ceux qui ont dit non » d’Actes Sud Junior. C’est Sofia Amor qui s’y colle, avec une courte biographie, suivie d’une douzaine de pages sur la lutte contre l’homophobie, de quelques photos commentées et d’une bibliographie. Petit livre sans prétention pour les collégiens surtout, pour leur proposer un exemple de militance sur les droits de l’homme.

Résumé

Le récit commence par une scène d’arrestation arbitraire d’homos draguant à Central Park, dans laquelle le jeune Harvey Milk est arrêté. Cela nous permet de faire connaissance avec ce sympathique personnage, qui commence par lutter contre l’intolérance dans sa propre famille : il n’ose pas annoncer qu’il est homo, étant donné les propos hostiles de sa mère « excessive et possessive comme une vraie mère juive » (p. 7) ou de son grand-père. À l’université, avant d’oser défendre les droits des gays, il s’entraîne en claquant la porte de l’association des étudiants juifs qui « refusa d’inscrire un étudiant goy » (p. 19). Il drague à l’opéra ou dans la rue, jusqu’à son petit ami, un minet de 22 ans qu’il rencontre le jour de ses 40 ans. Ils partent pour San Francisco, où ils ouvrent un magasin de photo. Suite à une agression, Harvey s’engage dans la politique locale, remue toute la ville, et finit par être élu conseiller municipal à sa troisième tentative, ravissant les uns, scandalisant les autres. On connaît la fin rapide grâce au film éponyme de Gus Van Sant (2009) : l’assassinat, en même temps que le maire, par un autre conseiller municipal homophobe et jaloux.
Les 12 pages documentaires donnent à grands traits quelques étapes de la lutte pour les droits des gays, en citant d’autres grands noms, comme Magnus Hirschfeld ou Louis-Georges Tin. On y apprend par exemple que c’est Harvey Milk qui donna l’idée du drapeau arc-en-ciel, dessiné pour la gay pride en 1978. On amputa le drapeau d’une couleur « lors du défilé posthume […] pour pavoiser chaque côté de la rue, mais il fallait pour cela un nombre pair de couleurs » (p. 86).

Mon avis

Il est amusant que ce court texte soit qualifié de « premier roman » de l’auteure, journaliste spécialisée en éducation. Il s’agit d’un récit fort peu romancé. Il a cependant l’avantage de proposer à nos élèves un héros courageux, et aussi de montrer sans fard une vie gay qui mêle la drague au sens des responsablités. C’est une qualité du livre de ne pas montrer une image lisse de l’homo des années 2000, mais de situer Harvey Milk dans l’écrin hippie de son époque. Je relève, pour la petite histoire, à propos de l’assassinat, un détail qui mériterait précision : dans ce livre, il tire au revolver 7 balles sur les deux hommes. Dans l’article de Wikipédia, il en tire deux de plus. Dans les deux cas, cela suppose, s’agissant d’un revolver qui est une arme de service, que le barillet de six coups ait été rechargé. On imagine le sang-froid avec lequel le type a assassiné ces deux hommes ! Je ne me souviens plus de la façon dont la scène était réglée dans le film.
Dans la partie documentaire, je relève une approximation, malheureusement habituelle dans ce genre d’ouvrages : « Au même titre que les juifs, les tziganes, les handicapés et autres minorités, les gays sont déportés durant la Seconde Guerre mondiale » (p. 78). Rappelons que les homosexuels (le mot « gay » n’avait pas ce sens) n’ont été « déportés » que dans les seules régions annexées (Alsace-Lorraine en ce qui concerne la France), aucunement dans le reste des pays occupés, pas plus, à ma connaissance, que les handicapés. P. 82, on lit que « l’école n’est pas très active, en dehors des actions menées par les associations SOS Homophobie et Contact, qui organisent des rencontres-débats » Cela fait plaisir, de même quand on ne trouve dans les deux pages de bibliographie dans ce livre destiné aux jeunes élèves, pas un seul livre de littérature jeunesse (même d’Actes Sud !), ni bien sûr, mention de votre site favori qui recense lesdits livres. En effet, « l’école n’est pas très active » ! Serait-il malvenu de penser que certains journalistes seraient quelque peu passifs ?

 Cet ouvrage bénéficie du label « Isidor ».

Label Isidor HomoEdu

 Lire l’article de Jean-Yves sur ce livre.

Lionel Labosse


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