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Une mine de connaissances pour les 4e / 3e et le lycée.

L’Homosexualité entre préjugés et réalités, de Jean-Baptiste Coursaud

Les essentiels Milan, 2002, 64 p., 5€.

jeudi 5 avril 2007

Il est difficile de trouver sous un volume aussi réduit, une telle mine de connaissances essentielles sur l’histoire de l’homosexualité et de l’homophobie. Le complément indispensable à L’Homosexualité à l’adolescence, d’Anne Vaisman, à faire figurer dans tous les C.D.I. et dans toutes les bibliothèques pour jeunes ou moins jeunes.

Résumé

Le livre d’Anne Vaisman aborde plutôt la question sous l’angle psychologique et sexuel. Les deux ouvrages ont des points communs, comme le conseil de réfléchir avant de faire son coming out. Dans ce livre, qui ne fait d’ailleurs pas particulièrement partie d’une collection destinée aux jeunes, tous les aspects historiques récents sont abordés, jusqu’aux backrooms (sans détails salaces qui pourraient exciter les pères et mères la pudeur). Les gays sont privilégiés, mais il y a quand même quelques témoignages de lesbiennes et de nombreuses informations. On apprendra par exemple l’étonnante histoire de l’invention du drapeau arc-en-ciel, ou l’origine mystérieuse du choix de la pomme arc-en-ciel comme logo d’une célèbre marque d’ordinateurs [1], ou encore l’origine du groupe Village People et de la house music. Les pages historiques nous rappellent qu’il y a 25 ans à peine, l’homosexualité était encore un délit. Nos victoires actuelles de militants sont bien modestes au regard de ce qui fut obtenu à cette époque. Le ton se fait parfois grave : « Neuf pays dans le monde maintiennent encore la peine de mort pour homosexualité : Mauritanie, Soudan, Pakistan, Tchétchénie, Émirats arabes unis et Yémen, Afghanistan, Arabie Saoudite et Iran ; ces trois derniers l’appliquent véritablement » (p. 46). De nombreuses personnalités du panthéon homosexuel, vivantes ou mortes, sont citées, des auteurs morts ou vivants, avec une abondante documentation iconographique. Le livre se termine par cinq témoignages, dont un d’un sans-papier bolivien qui a dû batailler malgré un pacs pour rester en France. Citons le témoignage de Sophie : « Je suis aussi très fière de ces nouvelles manières de vivre ensemble qu’ont inventées les garçons notamment. Je connais énormément de couples très unis, qui s’aiment, mais ça ne les empêche pas d’avoir des aventures hors de leur relation, d’être francs l’un envers l’autre et d’en parler » (p. 53). L’auteur, Jean-Baptiste Coursaud, est également traducteur du danois et du norvégien, ce qui nous vaut des informations intéressantes sur la Scandinavie.

Mon avis

Voici donc un excellent vade-mecum pour préparer un exposé sur la question. Si j’avais deux ou trois détails à reprocher, ce serait quelques phrases comme « parler d’un « lobby gay » est une fadaise dénuée de tout fondement » (p. 14). Le problème me semble davantage une querelle de mots, avec la fameuse connotation négative de « lobby » en France, qui n’existe pas aux États-Unis. Si les gays ont obtenu tant d’avancées législatives ces vingt dernières années, ce n’est pas par l’opération du Saint-Esprit. Il me semblerait plus honnête de reconnaître qu’il y a quelque chose qui ressemble à un lobby, avec certaines personnes qui s’efforcent de se faire passer pour des représentants incontournables de la communauté. La communauté gay est actuellement sans doute mieux représentée en haut lieu par exemple que la communauté maghrébine. D’autre part la définition de l’hétérosexisme donnée page 58 me semble tenir de la langue de bois : « pensée qui considère le sexe masculin et l’hétérosexualité comme étant le fondement d’un ordre symbolique ». Je préférerais : « comme supérieurs au sexe féminin et à l’hétérosexualité ». Enfin, la définition donnée des familles homoparentales à la page 40 me semble un peu idéalisée par rapport à une réalité souvent plus complexe. Il est vrai qu’à part une circonlocution telle que « enfant dont l’un au moins des parents ne se définit pas comme strictement hétérosexuel », je ne vois que le fameux néologisme « famille altersexuelle », à moins de parler d’alterparentalité. Dans ce domaine en tout cas, on peut parler si ce n’est de lobbying, du moins de militantisme actif si l’on craint absolument la connotation. Quand on évoque le « retournement de l’injure », on devrait pouvoir dire aussi : « On fait du lobbying, et alors ? » Le reconnaître ouvertement nous obligerait à favoriser une diversité dans ce lobby, diversité que certains craignent sans doute. Voir à ce sujet mon article sur la controverse au sujet du vote gay lors du référendum sur le Traité Constitutionnel en 2005.

 Cet ouvrage bénéficie du label « Isidor ».

Label Isidor HomoEdu

 L’auteur a également traduit du norvégien On est forcément très gentil quand on est très costaud, de Dag Johan Haugerud, Prinçusse Klura et le dragon, de Tormod Haugen et Caulfield : sortie interdite, de Harald Rosenlow Eeg.

Lionel Labosse


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[1Attention : cette histoire, qu’on trouve dans plusieurs livres de vulgarisation présents dans notre sélection, serait une rumeur internet. Voir dans cet article.