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« Garçon manqué », pour les 6e / CM2
Je ne suis pas comme toi, d’Isabelle Rossignol
École des loisirs, Neuf, 2006, 55 p., 7,5 €.
mardi 13 novembre 2007
Pas un mot de trop dans cette nouvelle en dix courts chapitres étalés sur trois jours. Elle dresse le portrait d’une fille de dix ans atypique, qui pressent sans le formaliser que son dégoût de certaines marques ritualisées de la féminité, lequel la met en marge de sa classe, la conduit sur un chemin difficile à tenir. L’analyse des sentiments est finement menée, sans accuser personne d’autre que la force des stéréotypes, qu’une directrice d’école aura d’ailleurs le bon réflexe de combattre plutôt que de punir. Bref, un livre idéal pour les CM2 / 6e, que la qualité de son écriture pourra faire apprécier pour les classes supérieures.
Résumé
Agathe, 10 ans, est une fille atypique, qui joue au foot et n’aime pas « les câlineries, les jupes, les bijoux, les couettes et les nattes » (p. 16), ni les « embrassades pleurnicheuses » ou les « accueil-pour-tata » (p. 27). Un soir, sa mère fait irruption dans sa chambre alors qu’elle est en train d’embrasser une photo de sa tante, qu’elle adore et qui va bientôt arriver. Du coup, elle est obligée de se justifier car sa mère croit qu’elle a « un petit amoureux » (p. 8). Avouer qu’il ne s’agit que de sa tante n’arrange rien, car sa mère est possessive et jalouse. En outre, elle lui reproche : « tu ne montres jamais tes sentiments » (p. 12), ce qui touche Agathe, qui s’endort « en pensant aux détails qui montrent que les gens s’aiment » (p. 14). À l’école, elle a un amoureux transi, Razvan, qui fait tout pour la secourir lorsqu’elle se bat avec une fille qui l’a traitée de « garçon manqué ». Razvan glisse discrètement un poulet dans la trousse d’Agathe, sans obtenir aucun effet. De retour à la maison, elle fait le lien entre cette bataille et l’incident de la veille, que sa mère a déjà oublié, ce qui entraîne une dispute terrible, avec des mots définitifs, et la formule éponyme (p. 40). Du coup, Agathe trouve dans le geste vain de Razvan le truc qui va renouer le lien avec sa mère. La directrice, au lieu de punir les belligérantes, propose une idée qu’on ne renierait pas au Collectif HomoEdu (notre devise est : « Combattre l’homophobie, c’est bien, promouvoir la diversité sexuelle, c’est mieux »), et que nous vous laissons découvrir.
Mon avis
En quelques pages, Isabelle Rossignol impose un style sobre, acéré, imagé, qui croque une silhouette fort juste, et une atmosphère familiale telle qu’on s’y croirait. Tout est dit ou suggéré, notamment par une belle métaphore filée : « les phrases de sa fille sont de petits cailloux qui lui montrent un chemin qu’elle ne sait pas trouver » (p. 34), cailloux qui roulent de page en page, et mèneront bien plus loin dans F comme garçon. La dispute entre la mère et la fille est particulièrement réussie, avec juste ce qu’il faut de méchanceté pour que l’amour s’exprime : « T’es méchante et t’es moche », ainsi que l’analyse des sentiments de Razvan et du retour qu’il en obtient. L’humour n’est pas oublié : « S’il n’était pas inquiet pour Agathe, il aurait envie de rire tant il lui semble que le maître et lui ressemblent à des cafards en train de s’affoler devant une bombe insecticide » (p. 23). À rapprocher de Entre les vagues, de Claudine Galea, pour lequel j’ai peut-être été un peu sévère. Il me semble que dans ce livre, bien que les mots homosexualité ou lesbienne ne soient pas utilisés, la question est plus clairement posée, à charge pour le lecteur de trouver la réponse.
– Cet ouvrage bénéficie du label « Isidor ».
– Lire l’avis de Corinne Chiaradia.
Voir en ligne : Entrevue avec l’auteure sur le site « encres vagabondes »
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