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Nietzsche, Platel, Helleu.

Synthèse de BTS sur la musique populaire

Un corpus (avec corrigé) original sur le thème « De la musique avant toute chose ? »

samedi 11 décembre 2021, par Lionel Labosse

Ce corpus pour une synthèse sur le thème de la musique populaire, avec 4 documents dont 2 issus des textes au programme du Bulletin officiel, a été concocté pour mes étudiants, à partir de ma lecture personnelle des œuvres en question. Vous trouverez une proposition de corrigé à la suite du corpus.

Document n° 1. Friedrich Nietzsche (1844-1900). La Naissance de la tragédie (1872), Gallimard, 1977, pp. 62-63.

« Pour en revenir à Archiloque [1], la recherche érudite a découvert que c’est à lui qu’on doit l’introduction de la chanson populaire dans la littérature et que telle est la raison de la place unique que l’estime unanime des Grecs lui réservait à côté d’Homère. Mais qu’est-ce qui oppose la chanson populaire à l’époque pleinement apollinienne ? Rien d’autre que d’avoir constitué le perpetuum vestigium [2]. de l’union du dionysiaque et de l’apollinien [3]. Son immense diffusion parmi tous les peuples, ce pouvoir, qui est en permanence le sien, de se renouveler et de s’enrichir sont pour nous les témoins de cette double impulsion artistique de la nature qui laisse sa trace dans la chanson populaire, comme, de manière analogue, les commotions orgiaques [4] d’un peuple qui s’éternisent dans sa musique. Il est du reste certain qu’on pourrait démontrer historiquement que toute période riche et productive en matière de chanson populaire est également soumise aux plus fortes secousses de ces courants dionysiaques qu’il nous faut toujours considérer comme le soubassement et la condition préalable de la chanson populaire.
Mais pour ce qui nous intéresse ici, la chanson populaire est d’abord à prendre comme miroir musical du monde, mélodie originelle à la recherche d’une manifestation onirique [5] qui lui soit parallèle et qu’elle exprime dans la poésie. La mélodie est donc l’élément premier et universel, qui pour cette raison, peut tolérer plusieurs objectivations et plusieurs textes. Elle est d’ailleurs, pour l’évaluation naïve du peuple, ce qu’il y a de plus important et de plus nécessaire. La mélodie enfante, et à vrai dire ne cesse d’enfanter la poésie : la forme strophique [6] – ce phénomène qui m’a toujours étonné jusqu’à ce que je finisse par lui trouver cette explication – ne veut pas dire autre chose. […]
Dans la poésie des chansons populaires, nous voyons donc le langage tendre de toutes ses forces à imiter la musique. C’est la raison pour laquelle, avec Archiloque, commence un nouveau monde de la poésie, qui contredit de fond en comble le monde homérique. Mais cela posé, nous avons en fait défini la seule relation qui puisse exister entre musique et poésie, mot et son : le mot, l’image, le concept recherchent une expression analogue à la musique et, par là, en subissent la violence dominatrice ».

Document n° 2. Les Bienfaits de la musique sur le cerveau, dir. Emmanuel Bigand, Belin / Humensis, 2018. Ch. 1 « Qu’est-ce qui est universel dans la musique ? », Hervé Platel, pp. 21-23.

« La raison de cette anhédonie [7] musicale reste mystérieuse. Parmi les hypothèses proposées, il semble que la construction du plaisir musical soit plus complexe que celui lié aux besoins basiques, tels le sexe ou la nourriture, et nécessite un dialogue entre, d’une part les régions du cerveau consacrées à la perception et à la mémoire (zones temporales et frontales) et d’autre part les circuits du plaisir (dits « de la récompense ») plus profondément enfouis dans le cerveau. Les personnes « anhédoniques musicales » n’auraient pas pu mettre en place les bases de ce dialogue entre perception, mémoire et plaisir dans leur cerveau. Elles auraient donc une compréhension « intellectuelle » des émotions musicales, mais sans les éprouver, et sauraient distinguer une musique joyeuse ou triste par sa structure rythmique et mélodique ; comme certaines personnes autistes qui distinguent les visages joyeux et tristes sur la base de l’orientation des traits faciaux, mais qui n’éprouvent aucune empathie émotionnelle face à ces mimiques… […]
L’éducation au plaisir
Contrairement à l’image d’Épinal [8] du plaisir musical comme un fait naturel et universel, les recherches en neurosciences de la musique nous forcent donc à reconsidérer les liens entre musique, émotion, jugement esthétique et plaisir. L’expérience du fameux frisson musical n’est pas innée, mais s’est construite durant l’enfance grâce au renforcement de situations que nous avons pu trouver agréables ou satisfaisantes. Le jeune enfant entendant ses premières chansons ou comptines y associe des moments de bonheur qui contribuent probablement à renforcer la connexion entre son cerveau affectif et son cerveau perceptif. Manifestement, certains sujets adultes n’éprouvent pas ou peu d’émotions à l’écoute de musique, et cela sans anomalie neurologique claire qui pourrait l’expliquer.
Une des questions les plus passionnantes aujourd’hui est de savoir en quoi consiste ce lien entre notre perception des sons et la mise en action de nos émotions profondes. Il ne suffit pas d’entendre pour vibrer. Encore faut-il que la musique soit décodée ; que sa structure, sa mélodie et son rythme soient analysés à la fois par les parties de notre cerveau qui entendent et par celles qui décomposent, comparent la hauteur des sons, effectuent des rapprochements avec les mélodies déjà en mémoire. Ainsi, les sujets présentant une amusie congénitale (incapacité à distinguer la hauteur des sons) sont rarement « touchés » émotionnellement par la musique, car les difficultés qu’ils rencontrent généralement dans la perception de la hauteur sonore ne leur permettent pas, par exemple, de construire une représentation fidèle et distinctive des mélodies.
Expert ou amateur ? Le plaisir musical s’échafaude par étages, allant de l’affect brut et viscéral jusqu’au sentiment esthétique du mélomane averti.
Voilà qui nous amène à distinguer au moins trois niveaux d’expression du plaisir musical. Au premier niveau se situe le plaisir primaire de l’expérience sonore. Les instruments de musique produisent des ondes sonores dont les vibrations stimulent l’ensemble du corps, en particulier les récepteurs tactiles de la peau, mais aussi les récepteurs internes des viscères. Cette expérience sensorielle physique et viscérale suffit à déclencher une émotion, même sans construction perceptive élaborée. Le deuxième niveau représente le fameux frisson musical, capacité à mettre en relation une expérience perceptive présente avec des représentations stockées en mémoire : tel morceau nous fera vibrer parce qu’il active des traces de mélodies en partie similaires, au moins par fragments, qui ont déjà été mémorisées et associées à des émotions. Ce plaisir est étroitement lié au décodage perceptif réalisé par le cortex auditif et à la mémoire des expériences déjà éprouvées en musique. »

Les trois niveaux d’expression du plaisir musical (doc. Hervé Platel).
© Belin / Humensis

Document n° 3. Nous, les enfants de 2003, Théo & Pascal Helleu, Wartberg, 2020, pp. 35-36.

« Le rap était déjà sorti des « quartiers ». Il devient aussi plus blanc avec Eminem, Vald et Roméo Elvis ; il se féminise avec Diams et Shay. La musique urbaine s’impose de façon spectaculaire alors que nous grandissons. Certains criaient déjà au blasphème quand le rap se mélangeait au rock. Finalement il avale tout et brise les frontières : tout est samplé, du jazz à l’opéra, de la variété à la musique classique. Comme les autres genres musicaux, le rap se diversifie et connaît différents courants. Les rappeurs français continuent de trouver leur inspiration chez des artistes américains. Mais ils savent développer leur personnalité propre, notamment avec des lyrics engagés, provocateurs ou poétiques, comiques ou festifs, et ceci dès l’époque de MC Solaar, NTM, Oxmo Puccino ou IAM. Déjà le rap sortait des ornières misogynes et homophobes des débuts pour exprimer des revendications sociales, mais également prôner la tolérance et l’empathie. Quand nous grandissons, le genre continue d’évoluer et de se diversifier. Nous écoutons du rap hardcore dont le gangsta rap et le rap politique, du rap conscient ou engagé avec Kery James, du rap comique avec Kamini. Musicalement, dans les années 2010, c’est la « trap » qui marque un renouveau. Elle se caractérise entre autres par l’emploi fréquent du piano et une ambiance mélancolique.
Parmi les Français, Booba est considéré comme l’un des plus grands rappeurs de sa génération et un découvreur de talents. Il est le premier à remplir le Palais omnisports de Bercy […]. Citons aussi Nekfeu et Jul. Dans un style moins agressif et plus littéraire, Orelsan est maintes fois récompensé par la profession, ainsi que Bigflo et Oli (B & O).
Les rappeurs remportent des victoires de la musique. Même dans la playlist de France Inter le rap est de plus en plus présent. On lui reproche de s’être embourgeoisé. Disons plutôt qu’il s’est anobli. Après tout, le jazz, la pop et le rock ont eu le même parcours : Paul McCartney et Mick Jagger ont été faits chevaliers de l’Ordre de l’Empire britannique et Bob Dylan a reçu le prix Nobel de littérature. Eux aussi ont fini par gagner leurs lettres de noblesses. L’heure de la reconnaissance a finalement sonné.
Dans le rap, les lyrics priment et les textes ne sont pas posés sur la musique mais ils la constituent : rythmes marqués, assonances et consonances, rimes et rimes multisyllabiques créent le flow, entre oralité et écriture. Comme dans le blues, on y exprime le mal de vivre, la colère, le manque de reconnaissance, les peines de cœur, les souffrances ordinaires des gens modestes.
Le succès du hip-hop ne doit pas masquer la persistance et le renouveau d’autres courants musicaux, même chez les jeunes. La génération Z aime aussi d’autres genres et les pratique parfois. Les saxophonistes jouent souvent du jazz, les pianistes et les violonistes de la musique classique ; nous sommes nombreux à être passionnés de rock ancien ou récent. Il y a même des réfractaires au rap. La diversité des goûts musicaux est d’ailleurs peut-être ce qui nous singularise. Il y a des dominantes ; mais tout existe et coexiste. Dire que la génération Z écoute du rap est vrai. Affirmer qu’elle ne connaît que cela est largement caricatural. »

Document n° 4. Photogramme extrait de la vidéo « Rockin’1000 »

« Rockin’1000 » est un show hors normes porté par plus de 1000 musiciens amateurs : guitaristes, bassistes, chanteurs, batteurs et claviers, qui reprennent les plus grands standards du rock sur la pelouse du Stade de France, en juin 2019. Il s’agit d’une tournée dont on peut trouver d’autres traces vidéo. Attention : il s’agit d’un corpus hors-normes réalisé en cours de formation, car pour une épreuve d’examen, on ne diffuserait pas une vidéo ; seul le photogramme ci-dessous est à considérer dans la synthèse.

Photogramme extrait de la vidéo « Rockin’1000 », Stade de France, juin 2019.
© « Rockin’1000 »

Proposition de synthèse rédigée

J’ai tâché de faire un corrigé bref, réalisable dans les conditions de l’examen, c’est pourquoi il y a trois axes, mais pas de sous-parties. En gros, mon conseil est de faire soit deux axes avec deux sous-parties, donc 4 alinéas, soit trois axes en une seule partie, donc 3 alinéas (hors intro et conclusion). Cela me paraît raisonnable dans le cadre de cette épreuve du diable qui exige deux devoirs en 4 heures. Les indications entre crochets et en gras sont méthodologiques : elles ne doivent pas figurer sur la copie !

[Introduction] [accroche / présentation du sujet] Les personnes cultivées opposent souvent avec condescendance la musique savante à la musique populaire, l’une exigeant une éducation musicale, quasi-scolaire et un cérémonial qui tient à distance les classes populaires, cantonnées aux comptines, au rock et au rap. [présentation des documents] Les quatre documents de notre corpus proposent des réflexions qui contredisent cette opposition. Dans le document 1, La Naissance de la tragédie, le philosophe Friedrich Nietzsche distingue deux courants esthétiques, l’apollinien et le dionysiaque, à la jonction desquels il situe la chanson populaire. Dans « Qu’est-ce qui est universel dans la musique ? », article tiré de Les Bienfaits de la musique sur le cerveau, un livre récent dirigé par Emmanuel Bigand, Hervé Platel donne une explication scientifique de cet aspect dionysiaque de la musique populaire. Théo & Pascal Helleu sont les auteurs du document 3, Nous, les enfants de 2003, et dans cet extrait ils s’efforcent de montrer que les goûts musicaux des jeunes de « la génération Z » ne sont pas si uniformes qu’on pourrait le croire. Le photogramme qui nous est proposé en document 4 est tiré d’une vidéo intitulée « Rockin’1000 », un spectacle réunissant un millier de musiciens amateurs pour le public du stade de France. [problématique] L’opposition entre musique savante et populaire peut-elle se réduire à l’opposition entre l’apollinien et le dionysiaque ? [annonce du plan] Après avoir expliqué cette association de l’apollinien et du dionysiaque au cœur de la musique populaire selon Nietzsche, nous nous demanderons comment évoluent les goûts musicaux au fil des générations ou au long d’une vie, puis nous nous pencherons sur les rapports entre paroles et musique qui sont au cœur du dionysiaque selon le philosophe.

[développement]
[1re partie du développement : association de l’apollinien et du dionysiaque au cœur de la musique populaire] Selon Nietzsche, la caractéristique pour lui naturelle de la chanson populaire est de conjuguer ce qu’il appelle « apollinien » (le stable et l’ordonné) au « dionysiaque » (l’instable, le fougueux, le désordonné). Ce dernier est associé aux rites orgiaques et aux secousses du culte de Bacchus, autre nom de Dionysos. Cet aspect dionysiaque semble toujours au cœur des musiques populaires actuelles selon Théo et Pascal Helleu. Le rap est une musique urbaine de « quartiers », avec des aspects provocateurs et festifs, mais aussi revendicatifs, des thèmes de prédilection proches des préoccupations des gens de milieux modestes, et des lieux de spectacle dédiés qui ne sont pas les salles de concert classiques, tout cela étant jugulé par l’aspect apollinien que l’on peut identifier dans la féminisation ou l’adoption de thématiques consensuelles. Le dionysiaque et l’apollinien ressortent également du photogramme de « Rockin’1000 », avec cette foule bigarrée de gens de tous milieux qui occupent une scène gigantesque d’un stade dédié en principe aux sports les plus populaires, jouant des instruments typiques de la musique de fête, gigantesque « bœuf » apparemment désordonné, mais pourtant cette fête orgiaque semble tellement bien organisée que vue de haut comme le propose cette vidéo, elle révèle aussi un aspect apollinien. La synthèse de l’apollinien et du dionysiaque est appréhendée d’une façon radicalement différente par Hervé Platel, qui distingue dans le cerveau de chaque humain, à l’exception des personnes « anhédoniques musicales » (incapables d’éprouver un plaisir musical), un dialogue entre des régions distinctes du cerveau, l’une dédiée à la perception intellectuelle (donc apollinienne) de la musique, l’autre à un niveau viscéral, purement sensoriel, qu’il symbolise dans un schéma par la large base d’une pyramide du plaisir musical, et ce côté viscéral rejoint les secousses évoquées par Nietzsche.
[2e partie : comment évoluent les goûts musicaux au fil des générations ou au long d’une vie]. Ce double aspect de la musique populaire semble fluctuer soit au fil des générations, soit au cours d’une vie. Selon le philosophe allemand, la chanson populaire serait née avec le poète grec ancien Archiloque, lequel aurait proposé une rupture radicale avec la poésie d’Homère, puis elle se serait diffusée, enrichie, renouvelée de façon universelle. Le rock, lui aussi semble avoir proposé une rupture radicale avec la musique qui le précédait, et ses adeptes sont non seulement des peuples variés comme la chanson populaire grecque ancienne, mais toutes les générations réunies au stade de France selon la vidéo. L’opération « Rockin’1000 » est d’ailleurs internationale. Le rap a proposé une autre rupture radicale selon le document 4, mais s’est mélangé au rock et en l’espace d’une génération, a « samplé » finalement tous les types de musiques, et d’un autre côté les goûts des jeunes actuels ne peuvent pas se résumer au rap ; tous les types de musiques restent pratiqués et certains jeunes n’aiment pas le rap. Le document 2 s’oppose à cette conception universelle et naturelle de la musique selon Nietzsche. Le frisson musical n’est pas pour lui inné, mais acquis au cours de l’enfance, et s’affine au fil de la vie notamment grâce à la mémoire qui stocke des mélodies et les émotions associées. Le passage de Homère à Arquiloque se ferait alors non pas d’une génération à la suivante, mais de façon intra-générationelle par la découverte au fil de la vie du frisson musical, qui nécessite une activité perceptive associée à l’affectivité et à la mémoire.
[3e partie : rapports entre paroles et musique] Cette évolution inter ou intra-générationnelle se caractérise par la façon dont les paroles et la musique sont articulées. Nietzsche développe sa théorie en expliquant que dans la chanson populaire, la musique est première, et que les paroles se coulent dans cette musique qui les domine et qu’ils ne font qu’imiter. La vidéo du stade de France confirme cette idée, puisque la plupart des chansons ont des paroles en anglais, et même si les paroles sont en français, la musique rock déploie une telle énergie qu’elle recouvre le sens des paroles. Le document 3 fait ressortir un paradoxe dans la pratique du rap. Si les paroles en sont parfois engagées ou littéraires, et semblent donc dominer la musique, c’est qu’en réalité, les textes deviennent musique par la façon novatrice dont ils sont proférés qu’on appelle le « flow » : les paroles se subliment en une musique basée sur le rythme plus que la mélodie, ce qui revient aux secousses de Nietzsche. Le lien entre paroles et musiques est encore radicalement différent dans la visée scientifique d’Hervé Platel : si les comptines enfantines, dans lesquelles on sait que le sens des mots importe peu, sont à la racine de la construction progressive et donc acquise du plaisir musical, il n’envisage pas la compréhension de paroles comme les autres documents, mais le décodage et l’analyse d’une autre grammaire, celle du langage musical. C’est de ce dialogue entre deux parties du cerveau que provient ce qu’il appelle le « frisson musical », qui n’est pas universel ni populaire, mais propre à chacun. Même les « anhédoniques musicaux » s’appuient sur sa structure pour interpréter une musique sans la ressentir.

[Conclusion] [bilan] Au terme de l’étude de ce corpus, nous devons reconnaître la valeur de l’intuition de Nietzsche, qui n’oppose pas ces deux composantes de l’art, l’apollinien et le dionysiaque. Malgré les soubresauts des modes successives et des oppositions factices entre générations, la véritable tension ne semble pas se situer entre musique populaire et musique savante, mais entre les personnes qui ont acquis la capacité de se livrer au frisson musical et les « anhédoniques » qui en restent privés et se contentent d’écouter ce qui est convenu dans leur milieu social. [élargir le champ] À l’instar du critique Carl Wilson évoquant Céline Dion, à la question « Pourquoi les autres ont-ils si mauvais goût ? » ne pourrait-on substituer « La musique que j’écoute me fait-elle réellement frissonner ? »

 Vous trouverez un extrait d’un autre livre de Pascal Helleu de la même série, Nous, les enfants de 1957, dans cet article.

Lionel Labosse


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[1Archiloque, né à Paros en - 712 ou en - 680, est un poète élégiaque grec. Il fut un des plus grands poètes lyriques grecs ; dans l’Antiquité, on le comparait à Homère.

[2Expression latine signifiant « trace permanente »

[3Dionysiaque / Apollinien : « dionysiaque » désigne tout ce qui est instable, erratique, insaisissable, sensuel, inspiré, fougueux — prétendument lié à l’Asie et à l’Orient, par opposition à ce qui est « apollinien », c’est-à-dire stable, ordonné, classique, rationnel, régulier — supposé être le propre du génie occidental

[4Qui a rapport aux orgies ou fêtes de Bacchus.

[5Qui a rapport aux rêves.

[6Relative à la strophe, groupement organisé de vers pouvant comporter une disposition particulière de rimes.

[7« Anhédonie » : incapacité fréquemment observée au cours de la dépression et de la schizophrénie, d’un sujet à ressentir des émotions positives lors de situations de vie pourtant considérées antérieurement comme plaisantes.

[8Idée reçue, cliché ; d’après la ville d’Épinal dans les Vosges où étaient imprimées des images naïves.