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« Rapport sur les discriminations » du 22 septembre 2010

jeudi 23 septembre 2010

Le 22 septembre 2010 le ministère de l’Éducation nationale a publié un « Rapport sur les discriminations » qui prend en considération de façon importante les discriminations liées à l’orientation sexuelle dans le cadre éducatif. Ce rapport fera date, car il contient de nombreuses « premières ». Il mentionne « les LGBT-phobies » et donc n’oublie pas la « transsexualité » et l’« identité de genre ». On relève en passant une contre-vérité agaçante : « De manière générale, il ressort de ces auditions que les propos homophobes se sont banalisés ces dernières années. » Cette idée, sans doute due à une association, devrait être relativisée par une commission sérieuse : au contraire, ces propos ont toujours existé, et loin de se banaliser, on commence enfin à entendre des propos contraires et des réactions ! Mais c’est une vieille habitude de toutes les associations, pas seulement LGBT, d’user de ce vieil argument de la direction ! En fait, l’idée est précisée par ces propos : « Ainsi, il semblerait que les discriminations ethnicoraciales diminuent au bénéfice de discriminations sur le genre et l’orientation sexuelle », mais la commission fait bien d’utiliser le conditionnel, et de préciser qu’il faudrait des mesures précises plutôt qu’une vague impression amplifiée par des militants qui sont cause et partie. Peut-être qu’il y a diminution globale, et que, sans augmenter en nombre, les discriminations altersexophobes se retrouveraient proportionnellement en hausse ? Mon opinion à moi est que l’on confond de vagues injures, parfois sorties comme plaisanteries, avec de vraies discriminations, fort rares. L’important n’est pas tant de lutter contre des discriminations que d’informer et d’éduquer, pour éviter une homophobie passive plutôt qu’active.

Sur d’autres points les représentants d’associations parlent d’or : « Un représentant de l’inter-LGBT, n’hésite pas à qualifier l’homophobie de « discrimination discriminée ». […] les associations relèvent cette contradiction que les LGBT-phobies ne sont pas traitées dans le milieu scolaire au même titre que les autres discriminations. […] intervenir contre l’homophobie en milieu scolaire est le plus souvent assimilé à un acte de prosélytisme, ce qui rend l’action difficile et la communauté scolaire frileuse. » La commission a tordu le cou à une antienne serinée pourtant jusqu’à récemment par de nombreux spécialistes auto-proclamés : « La question de la sphère privée n’est jamais autant mise en avant que pour l’homosexualité. Or si les pratiques sexuelles relèvent en effet de la seule vie privée, l’homophobie, dans ses manifestations qui touchent à la santé publique, à la violence et au décrochage scolaire, concernent la société et les politiques publiques au même titre que le sexisme, la xénophobie et le handicap. » Encore un petit effort, et on ajoutera que l’homosexualité et le fait transgenre sont aussi et avant tout des faits culturels dignes d’enseignement, comme l’hétérosexualité ou le « fait religieux » ! Et, à la fin des fins, on ne parlera plus de façon négative, d’homophobie, mais de façon positive, d’éducation à la diversité sexuelle ! Voir ce que préconise la commission à propos dudit « fait religieux » : « Conforter la connaissance des faits religieux comme un fait de culture et de civilisation dans l’ensemble des disciplines ». Certes, eh bien ! pourquoi pas autant pour les faits ethniques et culturels, et les faits sexuels ? Façon beaucoup plus efficace de contrer les discriminations que les leçons de morale habituelles.

Relevons une proposition qui nous fait plaisir : « Mutualiser ou créer des outils pédagogiques (par exemple sur le modèle de la clé USB remise à tous les stagiaires IUFM du Rhône) et diffuser les ressources qui permettent d’aborder le sujet. » Eh bien, messieurs-dames, nous en avons en masse, des ressources, sur notre site ! Ça fait plaisir de temps en temps, quand on roule en avance, de voir le paysage vous rejoindre ! De même, on relève parmi les propositions finales, une revendication du collectif HomoEdu : « Élargir la semaine de lutte contre le racisme à une semaine d’éducation à l’égalité et de prévention de toutes les formes de discriminations. » Il est d’ailleurs étonnant de voir figurer parmi les associations auditionnées, « L’autre cercle ». On se demande bien quel est le rapport de cette association de chefs d’entreprise LGBT avec l’éducation. Le collectif HomoEdu n’a pas été sollicité parmi les « personnalités qualifiées »…
Pour le reste du document, je suis parfois dubitatif. La commission évoque les difficultés de scolarisation des « enfants du voyage » (sic), sans rappeler que ces difficultés proviennent en grande partie d’une discrimination effective commise par l’État français à l’égard de ses ressortissants tziganes, c’est-à-dire le livret de circulation, qui oblige même les propriétaires de leur terrain à se déplacer s’ils ont un logement mobile ! De même, quand la commission déclare : « Ainsi, la loi de 2004 sur l’interdiction des signes religieux à l’École n’a jamais été mise en cause pendant les auditions », elle ne se demande pas si par le plus grand des hasards, elle n’aurait pas discriminé les associations ou personnalités qui auraient pu se plaindre de cette loi, comme par exemple Marjane Satrapi ou la Prix Nobel de la paix Shirin Ebadi, qui s’étaient prononcées contre à l’époque ! La méthode Coué fait toujours des émules !

 Voir notre article sur L’éducation nationale et la diversité sexuelle en France (Chronologie des circulaires et autres dates marquantes).

Lionel Labosse
© altersexualite.com, 2010
La vignette vient d’un programme canadien : « L’homophobie, pas dans ma cour ».


Voir en ligne : « Rapport sur les discriminations » du 22 septembre 2010